Le Portulan, la mauvaise chance - 1947
France, langue française.
Cynthia Bowland est une jeune fille de 24 ans, propriétaire du domaine Ocklawaha Grange en Floride et héritière de la large fortune de son défunt père. Cette fortune, mais aussi son grand cœur et son incroyable beauté font qu'elle attire une poignée de prétendants qu'elle accueille de façon quasi permanente. Il y a Bruce Kennedy, officiellement son fiancé, gros buveur et pas très fufute, qui est accompagné de sa tante Katryn Doole, coureuse de dote cassante et aigrie d'une cinquantaine d'années. Il y a ensuite Roydon "Roy" Kendall, peintre reconnu de cinquante-trois ans, ami de la famille de longue date, qui connaît Cynthia depuis qu'elle est toute petite et qui, même s'il s'autopersuade qu'il ne ressent que de l'amour paternel, ne reste pas insensible aux charmes de la jeune fille. Quant à Nigel Orson, flambeur et détesté de tous, il vient de mourir des suites d'un empoisonnement long et méthodique à l'arsenic.
Pour mener l'enquête, débarque sur le domaine (mais aussi dans la vie de Cynthia) le jeune inspecteur Anson Wadham, de la brigade criminelle de Dallas, détaché dans la région. Les interrogatoires parfois informels, les inimitiés, les coups de poing, mais aussi les sentiments forts et insoupçonnés vont mettre en difficulté le travail de l'enquêteur, qui aura toutes les difficultés du monde à découvrir qui, parmi ces suspects qui ont tous une raison valable d'en vouloir au défunt, a de façon méthodique et machiavélique empoisonné la victime...
Cynthia devant la mort est le premier roman publié par Serge Arcouêt, sous le pseudonyme de Terry G. Stewart, même s'il use de son véritable patronyme en tant que traducteur (subterfuge malin qui permet de faire passer un texte écrit par un de leurs compatriotes auprès d'un lectorat français qui ne jure alors que par le polar américain !), lui accolant même par souci de crédibilité un titre en anglais, Death has many Faces !
Comme il s'agissait du tout premier roman jamais publié par cet auteur, je m'attendais, pour être honnête, à un texte un peu vert, voire très classique, car sans doute "copié" sur ses pairs Anglo-saxons. Et bien, braves gens, amis lecteurs, amies lectrices, j'ai été plus que surpris par la qualité de ce roman. Et encore, surpris est un peu léger : j'ai été totalement bluffé !
Terry G. Stewart (on va l'appeler comme ça, c'est plus simple) propose ici un roman incroyable, dont la construction intelligente - les chapitres sont écrits à la première personne, du point de vue de chacun des protagonistes - fait de cette première œuvre un véritable "page turner" comme on dit en perfide Albion.
On pourrait me targuer de mauvaise foi, de parti pris, de condescendance, bref de toutes ces petites choses que l'adoration que je voue à cet auteur pourrait provoquer... Il n'en est rien ! Ce livre est vraiment, sincèrement, excellent. Il est déjà riche de l'écriture unique et poétique de Serge Arcouët, de cette plume qui transforme un livre "de gare" en véritable œuvre littéraire. Vous ne me croyez pas ? Et bien, allez donc goûter à sa prose !
En guise de conclusion, je me dois de parler de la grande tristesse que la lecture a provoquée au plus profond de l'amoureux des livres que je suis : ce roman vieux de 78 ans (!), malgré une manipulation attentive et une attention particulière, a physiquement un peu souffert. La reliure a flanché, séparant les pages en deux blocs, et la couverture a perdu quelques bribes de matière, laissant les stigmates du temps qui passe en ses coins et tranches. Je pleure, mais il a su dans sa souffrance prodiguer les plaisirs intenses que le lecteur que je suis attendait de lui. Voilà, ça va mieux en le disant !
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Serge-Marie Arcouët (18 mars 1916 - 28 janvier 1983) était un écrivain Nantais prolifique, qui a utilisé plusieurs pseudos durant sa carrière. C'est sous celui de Terry Stewart qu'il se fera connaître : sur les conseils de son ami Thomas Narcejac, il propose son roman La mort et l'ange à Gallimard pour publication dans la fameuse collection "Série Noire". Bingo, ce roman devient le premier d'un auteur français édité dans cette prestigieuse collection (même si Serge Arcouët n'y est mentionné que comme traducteur, subterfuge malin qui brouille les pistes) et remportera un colossal succès.
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